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Jeunes diplômés : le décollage de début de carrière

Xerfi Canal a reçu Michel Mondet, Président d'Akeance Consulting, pour parler des jeunes diplômés. Une interview menée par Thibault Lieurade.

Bonjour Michel MONDET.

Bonjour Thibault.

Vous êtes président d’Akeance Consulting et on va parler dans cette interview de l’évolution ou plutôt de la construction de la carrière. Je voudrais commencer cette interview par une question personnelle. Est-ce que vous vous souvenez de vos premières années de carrière ? Et, si oui, qu’est-ce que vous en retenez ?

Oui, oui comme tout le monde je pense d’ailleurs. Je me souviens de deux choses. La première chose, c’est que je suis de la génération de la méritocratie donc je voulais absolument bien faire mon travail. Je voulais rendre une bonne copie. Deuxième sujet, je me souviens très bien comme j’étais peu sensible aux discours sur mon futur. Mes chefs m’expliquaient que j’étais un bon élément etc. Me parlaient de « quand j’aurai trente ans, dans 5 ans » etc. Tout cela m’est passé complètement à côté. Je pensais qu’on se mêlait de ma vie si vous voulez. Je trouvais même cela outrecuident.

Alors avec le recul que vous avez, en quoi ces premières années ont pu conditionner la suite de votre brillante carrière ?

Merci pour « brillante ». Non, j’ai un petit peu honte de ces deux souvenirs. Le premier parce que déjà on est plus en méritocratie. Et puis tout le monde autour de moi faisait en sorte que l’on mette en route le junior. C’est un peu comme dans l’avion. Vous êtes dedans sans vous rendre compte que c’est tout le personnel au sol qui pousse l’avion, qui l’amène au taxiway etc. Et puis deuxièmement, sur le temps long, j’ai beaucoup appris parce que je me suis rendu compte que cette vision du temps long, cette capacité à être un peu hypermétrope quand vous regardez ce qui se passe autour de vous est absolument majeure pour à la fois gérer ou construire une carrière.

Alors si l’on file la métaphore de l’avion, quid de la suite de la carrière et de la trajectoire de l’avion ? Comment faut-il considérer les aléas dans la carrière : problèmes de santé, éventuel licenciement… Et est-ce qu’on peut considérer finalement une fin de carrière anticipée comme un crash d’avion ?

Je vois. D’abord, il faut être très clair. Il n’y a pas même pour un même avion, si je reprends la métaphore filée, la même trajectoire. Il n’y a pas la même destination, il n’y a pas la même charge au décollage, il n’y a pas la même pression atmosphérique, les vents… Il n’y a pas une trajectoire type donc il faut d’abord dire aux équipes qu’il n’y a pas une trajectoire type chez Akeance ou ailleurs. Il y a une trajectoire pour chacun des collaborateurs. Il y a un décollage au début, un moment où on construit beaucoup, où on se fait sa propre expérience donc on a l’impression que ça va durer éternellement mais ce n’est pas vrai. Ça va durer avec plus de calme. Donc l’avion va évidemment être moins redressé qu’au début. Et puis, vous l’avez déjà vu dans l’avion, au fil du temps il y a quand même des virages. Ce sont les événements de votre vie. Ce qui va se passer. Vous avez les contraintes négatives que vous évoquez (les licenciements, les contraintes de maladies, de vie personnelle). Puis vous avez aussi à observer ce qui est positif : un ami qui vous propose une aventure industrielle, votre chef vous propose une mutation… Enfin, vous avez des tas de sujets qui sont des virages qu’il faut observer. C’est ça la vision longue. Donc il faut vraiment avoir cette similitude sachant que chacun a son propre parcours, sa propre trajectoire personnelle pour construire ses compétences et son expérience. Sur la fin de vie professionnelle Thibault, la plupart des avions atterrissent. Ils ne se crashent pas. Ce n’est pas un crash. La plupart des avions atterrissent, ils ne se crashent pas. Donc la fin de vie professionnelle c’est un bel atterrissage et puis une nouvelle vie qui commence. Il n’y a évidemment pas de crash en fin de vie professionnelle.

Si on en revient aux premières années, dans une précédente interview on avait évoqué les difficultés de recrutement des jeunes diplômés qui hésitaient à s’engager par exemple. En quoi considérer cette trajectoire d’avion peut les aider à décoller finalement ?

Très bonne question Thibault. Très très bonne question parce que les jeunes embauchés, je le vois bien chez Akeance, ils se posent beaucoup trop de questions sur eux-mêmes. Il faut qu’ils se laissent beaucoup faire. Alors ils ne sont plus dans la méritocratie comme nous l’étions, ils sont dans le questionnement permanent tous les jours, dans la remise en cause. Qu’ils se laissent un peu plus faire. Et qu’ils aient plus vite une vision long-terme, qu’ils aient plus vite une capacité à se dire si j’apprends pendant deux, trois, quatre, cinq ans c’est du bon apprentissage. Donc se dire « je suis un peu hypermétrope de ma carrière et je ne regarde pas simplement les résultats de ma journée ou l’imperfection de ma journée ». Pour les deux, il faut quelque part avoir confiance aux autres et la jeunesse n’a pas tellement confiance aux autres. Ils n’ont confiance, en fait, qu’en internet si vous voulez.

Et bien merci beaucoup Michel Mondet d’être venu partager votre expérience.

Merci à vous.

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